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EXPOSÉ 7

La méthode d’entraînement à la pleine présence

Les outils de l’entrainement* : présence et rappel

L’entraînement à la pleine présence consiste d’abord à pratiquer l’attention dans la présence attentive. Il s’agit de découvrir l’expérience d’attention, puis de la cultiver en y revenant régulièrement. Le retour à l’attention est ce que l’on nomme le rappel. Il s’agit de revenir à la présence attentive chaque fois que l’on s’en est distrait.

L’attention se cultive d’abord en restant présent à un support, en laissant l’attention posée sur un support, ce support peut être la sensation de la respiration ou une autre expérience sensorielle, visuelle ou auditive. Initialement la présence au support se perd facilement, l’attention est instable. Il est nécessaire d’apprendre à discerner les distractions et à revenir au support d’attention chaque fois que l’on s’en est distrait. En utilisant ainsi le rappel on apprend à rester attentif sans distraction. Progressivement l’attention ponctuelle à un support deviendra une qualité de présence attentive à l’instant présent.

La pratique du rappel vient de la capacité à discerner l’état en lequel nous sommes, attentifs ou non, et à revenir à la présence attentive, chaque fois qu’elle a été perdue. La reconnaissance de notre état permet de repérer les distractions, et de revenir à la présence au support d’attention. La reconnaissance de l’état dans lequel nous sommes et le retour à l’attention lorsque nous nous en sommes distraits opèrent ensemble et se complètent, ils constituent le rappel.

À chacune des huit étapes sont proposés des situations pour cultiver le rappel en action afin de poursuivre l’entraînement à tout moment de la vie. Au moyen des rappels proposés à chacune des étapes nous intégrons, petit à petit, l’état de pleine présence en toutes situations. Les septième et huitième étapes détaillent la pleine présence intégrée à la vie quotidienne.

Le premier outil : l’attention ou présence attentive

L’attention ou présence attentive est une expérience claire, lucide, vive, précise et stable de ce qui est observé. Elle se cultive avec le moins de tension possible. Ce sont les rappels réguliers qui ramènent à son expérience, établissant ainsi sa stabilité et sa continuité.

Comme nous le verrons dans les étapes de l’entraînement, la présence attentive s’approfondit dans la détente et l’ouverture. L’état d’attention devenant progressivement un état de vigilance sans tension, d’absence de tension. Le point important à souligner ici est que la pratique n’évolue pas dans le sens de plus en plus de concentration tendue, mais au contraire vers une diminution progressive de la tension. Au début une certaine tension est inévitable et nécessaire mais la pratique évoluant il y a de moins en moins de tension. Finalement, la présence attentive devient pleine présence : une ouverture naturelle, claire, lucide et détendue.

Dans l’entraînement, nous apprenons à régler le degré de tension et à accorder la tension de l’esprit à la situation présente, sans que celui-ci ne soit ni trop tendu, ni trop détendu. Et, petit à petit, nous apprenons à rester détendu en un état de clarté lucide. Comme nous le verrons ultérieurement[1], trop de tension peut favoriser l’agitation et trop de détente, la torpeur.

L’histoire de Shrona : « régler la tension de l’attention »

La célèbre histoire de Shrona, qui était un joueur de vina (une sorte de guitare indienne) disciple du Bouddha nous apprend comment ajuster la « tension de l’attention ». Un jour, alors que Shrona pratiquait la pleine présence il demanda au Bouddha :

  • « Maître, comment poser mon esprit dans l’attention juste ? »
    Et Bouddha lui répondit :
  • « Shrona, toi qui es un grand joueur de vina, comment accordes-tu ton instrument pour qu’il sonne bien ? »
    Shrona lui dit :
  • « Maître, il faut que les cordes aient la tension juste, ni trop, ni trop peu. »
  • « Eh bien, pareillement, lui dit le Bouddha, il faut que ton esprit ait la tension juste, qu’il ne soit ni trop tendu, ni trop détendu ».

Dans cet équilibre de la tension juste, l’entraînement à la présence attentive consiste à allier la détente à l’acuité d’une lucidité claire. L’acuité de la clarté demande une certaine tension, une présence soutenue, la détente permet de reste stable en cette clarté. Au cours de l’entraînement, la pratique évoluera vers une diminution de la tension et de moins en moins d’intervention, tendant vers un état de repos naturel. 

L’attention est ainsi le premier outil de l’entraînement et la base de la pratique. Elle permet de développer la présence attentive à une unique chose, ou à la simple clarté à l’instant.

Le deuxième outil : le rappel

Le rappel est le moyen par lequel on revient à l’attention, à la présence attentive, chaque fois qu’on en a été distrait.

Le rappel demande d’abord de reconnaitre comment est notre état présent, de reconnaitre l’état en lequel nous sommes – attentif ou non –. Si nous perdons le contact avec le support d’attention nous revenons à celui-ci. Ce retour à l’attention au support établit progressivement la continuité de la pratique. La reconnaissance nous apprend à discerner les distractions qui nous éloignent de la présence attentive et nous pouvons ensuite y revenir sans suivre ce qui nous en distrait. Nous cultivons ainsi le rappel de façon régulière, répétitive, systématique, de plus en plus fréquemment, jusqu’à ce que la présence attentive devienne régulière et stable.

Nous allons apprendre à développer le plus de circonstances possibles de rappel jusqu’à ce que, progressivement, une faculté de rappel spontanée apparaisse.

Différents types de rappels sont cultivés pour établir la continuité de la présence attentive et d’une façon générale de la pleine présence quel que soit sa qualité particulière. Par l’entraînement, à force de rappels, la pleine présence devient de plus en plus stable et naturelle.

Les trois principaux types de rappels sont :

  • Les rappels instantanés,
  • Les rappels « petites pauses »
  • Les rappels en situations particulières.

Les rappels instantanés

Ce sont de brefs instants de pleine présence, des rappels ponctuels, comme des « flashs » de présence qui durant un instant, nous font « décrocher » du mental pour nous plonger dans l’instant présent. Il ne s’agit pas d’essayer de prolonger artificiellement ces courts instants, ce qui deviendrait contre-productif. Il vaut mieux cultiver des rappels instantanés fréquents, répétés. On revient ainsi à la simplicité de la présence naturelle « en décrochant », « en se suspendant ». Il ne s’agit pas de se tendre en voulant prolonger artificiellement un état de présence artificiel. On découvre qu’il est possible de rester suspendu un court moment dans un état de simple présence non mentale et de continuer ce que l’on était en train de faire.

Les rappels instantanés sont la pratique principale du rappel, les autres formes étant là pour nous y préparer et nous y aider. Ces rappels instantanés sont les plus importants mais les plus difficiles. Ils ne se développent que progressivement par la force de l’habitude.

Les rappels « petites pauses » 

Ce sont des micro-sessions de pratique qu’on peut faire à n’importe quel moment de la journée. On apprend à ponctuer sa journée avec elles. On s’offre de courtes périodes de repos en pleine présence (de quelques respirations à quelques minutes). Elles peuvent durer environ 3 minutes et nous pouvons faire une vingtaine de petites pauses par jour, voir plus ! Nous avons déjà pratiqué la méditation la plus simple qui est une excellente façon de faire une petite pause, dans la deuxième étape de l’entrainement nous verrons plus en détails différentes façons de les pratiquer.

Les rappels en situations particulières

Pour cultiver le rappel nous choisissons dans notre vie quotidienne des situations particulières qui vont devenir des circonstances de rappel. Chaque fois que nous rencontrons une de ces situations, nous la vivons en pleine présence. Petit à petit, l’entraînement se développe en utilisant de plus en plus de situations particulières et donc de plus en plus de sources de rappel (comme une sonnerie de téléphone, un feu rouge, une rencontre, le début d’une activité, d’un échange ou d’un entretien, etc.). Petit à petit ces situations deviennent automatiquement un instant de pleine présence.

Les trois types de rappels et leurs particularités seront contextualisés à chaque étape. Une liste de situations types est proposée à chaque étape, elles se trouvent dans le carnet du pratiquant.

RESUME

Les outils de l’entraînement sont la présence elle-même et le rappel de la présence.

Nous cultivons la présence au moyen du rappel revenant à son expérience chaque fois que nous en sommes distraits.

L’observation, les rapports d’expériences et les ajustements

L’entrainement est fondé sur l’observation. C’est en observant notre expérience que nous pouvons progressivement ajuster notre pratique en appliquant les remèdes nécessaires. Pour développer ce sens de l’observation durant l’entraînement, nous sommes régulièrement invités à faire des « rapports d’expérience ». Ils nous apprennent à aiguiser notre attention et à trouver les mots justes pour décrire l’expérience que nous vivons, ce qui nous permet de mieux la comprendre et aussi de mieux la communiquer.

L’approfondissement de notre observation et de notre compréhension va, à son tour, nous aider à approfondir notre expérience. Compréhension et expérience s’entraident dans une dynamique qui nous permet de comprendre l’expérience et d’expérimenter ce qui est compris.

[1] Dans la section intitulée « Les obstacles à l’entraînement et leurs remèdes »

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